Yann Toma, Statements

S’il se présente comme un artiste-entrepreneur s’étant approprié depuis 1991, puis l’ayant rachetée à l’INPI, l’enseigne « Ouest-Lumière » - le nom d’une ancienne compagnie d’électricité - dont il s’est nommé Président à vie, Yann Toma développe toute une activité qui prend les formes les plus diverses et dont les maîtres mots sont énergie, flux, lumière et engagement. Enseignant à l’université Paris 1, il a créé un observatoire de recherche intitulé « Art & Flux », tout à la fois théorique et critique, d’expérimentation et de production, qui s’applique à rendre compte des relations entre l’art, l’économie et le politique.

Dans cette qualité-là d’investigation, Yann Toma siège depuis 2007 au sein de l’Organisation des Nations Unies en qualité d’observateur-artiste, disposant à ce titre de bureaux à l’emplacement même du siège de l’Organisation internationale de New York. Invité à toutes les assemblées générales, au conseil de sécurité et autres réunions organisées par l’O.N.U., il en suit les interventions à la façon d’un chroniqueur judiciaire, croquant aussi bien les chefs d’Etat et autres figures politiques qui y défilent que les membres de la société civile qui y font une communication.

De retour à l’atelier, Yann Toma - qui a accès à un site audiovisuel réservé retranscrivant toutes les interventions de ces derniers - les réécoute, relève leurs paroles les plus fortes tout en dessinant leur portrait au fusain sur papier, y inscrivant en lettres capitales leur nom, leur fonction, le jour de leur intervention et quelques-unes de leurs paroles clés. Il a ainsi constitué toute une galerie de personnalités – par exemple les cent cinquante chefs d’états qui se sont succédé à la 69ème assemblée générale de septembre 2014 - d’une singulière force d’expression, qu’il désigne du terme générique de Statements et qui joue des traits caractéristiques de ses modèles parce que captés sur le vif et retranscrits après coup lors du re-visionnage. Tout en balançant entre réel et mémoire, les portraits de Yann Toma ne manquent pas de traduire une présence, d’autant que les paroles qui les ornent leur confèrent non seulement une résonance plastique mais le son d’une voix engagée.


Philippe Piguet